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Maxime Le Forestier
Interview
Entretien consacré à la sortie du DVD des leçons de musique "Le Forestier joue Brassens"
et à son dernier modèle Quéguiner.

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LG : Alors parlons guitare, pourquoi un deuxième modèle Quéguiner ?
MLF : Ca fait bientôt 10 ans qu'elle existe, elle a fait le tour du monde plusieurs fois, des centaines de concerts et là, je me sentais repartir pour une longue tournée et je me suis dit ce n'est pas prudent. Il faut que j'aie une rechange. Et comme il lui restait un peu du bois dont il avait fait la première, je lui ai demandé de lui faire la sœur. Il y a une seule différence, ce sont les repères de touches qui sont des larmes mais dans l'autre sens.(Les larmes, repères de touche ont été inspirées par le poème de Louis Aragon 'il n'y a pas d'amour heureux" et particulierment par la phrase : "ce qu'il faut de sanglots pour un air de guitare, il n'y a pas d'amour heureux" NLDR)

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Modèle jumbo Quéguiner 1996

LG : Et vous en êtes content pour l'instant ?
MLF : Ah mais c'est paradisiaque ! Maintenant j'alterne entre les deux. Il y en a une qui est sur scène avec la back-line et l'autre qui est dans ma chambre d'hôtel. Ca me permet d'avoir des changements de cordes qui sont plus souples. Je change de cordes, je la joue deux trois fois dans ma chambre d'hôtel et je la ramène ensuite sur scène.

LG : Justement, concernant les cordes, j'ai appris que vous montiez le plus gros tirant !
MLF : Oui, c'est une habitude de " manchard " (rires)

LG : Qu'attendez-vous d'une guitare ?
MLF : La première chose que j'attends d'un instrument quel qu'il soit quand il arrive chez moi, c'est une chanson. Chaque instrument qui est arrivé chez moi, il y a eu une chanson qui a été faite dessus. C'est le ticket d'entrée sinon, ça ne reste pas.

LG : Peut on savoir quelle a été la chanson qui a été faite sur la nouvelle Quéguiner ?
MLF : C'est une chanson qui n'est pas encore sortie et que j'ai écrite pour Maurane.

LG : On vous voit déjà en 1975 avec G. Brassens dans l'atelier de Favino, depuis quand connaissez-vous la lutherie guitare ?
MLF : Depuis 1967, ma première guitare, j'avais 18 ans, je faisais beaucoup la manche et des cabarets et j'avais une Paul Beuscher en contre-plaqué lamentable que j'avais achetée à quatorze ans. J'avais une classique que j'avais achetée 100 balles aux puces qui ne valait pas mieux. J'avais besoin d'une guitare qui ait du son et j'ai raclé mes fonds de tiroir et je suis allé voir Jacques Favino qui était le luthier de Brassens et aussi d'Hugues Aufray. Il faisait les grosse guitares folk d'Hugues Aufray et je lui ai commandé une douze cordes, une grosse avec laquelle j'ai travaillé plusieurs années et que j'ai toujours d'ailleurs. Elle vieillit mal, table d'harmonie trop mince, mal barrée, ça se gondole…
Favino est donc devenu comme ça la référence. Après il y a eu un événement en 1971 qui est une anecdote amusante : Joan Baez arrivait d'Italie pour chanter à Paris, et je vais la chercher à Orly et elle avait dû mettre sa guitare, une Martin de 1880, dans la soute. La guitare arrive, elle ouvre l'étui, la table d'harmonie entièrement fendue. Et là, je la vois pleurer. Je la console : " écoutez je connais quelqu'un à Paris qui va vous réparer ça, ne vous inquiétez pas, on y va tout de suite ! ". On va chez Favino, je lui montre la Martin et lui : " bon, repassez demain matin ! " (rires) Le lendemain vers midi on repasse, la guitare était prête, on ne voyait rien, le son n'était pas altéré et Joan Baez demande à Favino : " Combien je vous dois ? " et Favino lui répond : " Je ne fais pas payer les réparations ". Il m'a raconté car je n'étais pas là mais elle lui a donné 1000 dollars et elle lui a dit : " Dans ce cas, faites une guitare à Maxime ". Et c'est de là qu'il m'a fait ma guitare rouge.

LG : Belle anecdote !
MLF : C'est beau non ?! (rires)

LG : Quels sont vos rapports avec Alain Quéguiner ?
MLF : Très proches !
LG : Lui laissez-vous une certaine liberté dans le choix de l'élaboration de l'instrument ou lui faites-vous un "cahier des charges" très précis ?
Ah non … bon, le manche. Je lui apporte une guitare dont j'aime le manche et il fait le même. La simplicité de décoration, moi je suis comme ça, j'aime pas avoir mon nom en nacre comme les accordéonistes (rires). Moi j'aime bien la forme ronde de ses guitares, bien féminine, bien sensuelle, j'aime bien ça. Pour le reste, il fait pour le mieux.

LG : Vous lui laissez une totale liberté ?
MLF : Ah oui, oui !! Et puis, je tiens beaucoup à une collaboration étroite avec mon ingénieur du son. Parce que la place des micros à l'intérieur, la qualité des câblages, etc.… c'est aussi très important. Je refuse qu'il y ait un pré-ampli dans la guitare, qu'il se démerde mais je veux qu'elle soit légère. Là, je suis dirigiste là-dessus, oui. Il aurait voulu mettre le dernier modèle de je ne sais quoi mais on restés sur le modèle Fishman. Il n'y a pas de pile à mettre dedans. Je déteste écarter les cordes et aller chercher une pile, ça me fait chier et puis mettre un boîtier dans la guitare, je trouve que c'est un crime. Le luthier pense que non car il est placé à des endroits où ça ne vibre pas… mais bon, on a des principes ou on n'en a pas ! (rires)
LG : Vous dites que vous êtes proches de votre luthier. N'est-ce pas justement l'un des avantages de choisir un luthier plutôt qu'un magasin de guitares ?
MLF : Ca rejoint votre question : " qu'est-ce que vous attendez d'une guitare ? ". Il faut qu'elle ait une histoire évidemment. Je connais l'homme qui l'a faite… ce n'est pas du tout pareil.
 

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